AU LAOSTHAN





Au Laosthan on aime beaucoup les enfants, mais on aime encore plus le pain. Là-bas ils font du pain qui ressemble à du flan. À d'énormes flans cuits sur des plaques de fer noir qui durcissent sous des coulées de lave dorée brillante et craquelante laissant paraître, par endroit, une mie crémeuse au travers d'une croûte cuivrée. Chacun fait le pain à son tour pour toute la famille. À midi, les enfants, les oncles et les tantes, les cousins, les cousines, les parents plus ou moins éloignés viennent chez l'un ou chez l'autre chercher son morceau de pain pour la journée. Il n'y a pas de cuisine pas de salon, pas d'entrée ni de terrasse dans les demeures du Laosthan. L'architecture serait plutôt tout en longueur, avec une chambre ou deux dans le fond et des commodités. Le poêle où cuit le pain flanique est situé près de la porte, et dès le bon matin, des fumées de cuisson s'entortillent autour de la façade en faisant des mouvements de sémaphore. L'odeur du pain se répand dans les venelles du village, monte et se mêle aux autres odeurs de pain, aux pains des autres familles mordorant l'espace public. Les enfants aiment venir chercher le pain qu'ils grignotent en rentrant lentement au foyer. Ils en profitent pour passer par les chemins creux, les bords de l'eau et les lisières de forêt. Arrivés aux étangs, ils jettent alors des cailloux aux grands oiseaux gris-bleu qui coulissent à la cime des montagnes enneigées reflétées par les eaux. Ils se font disputés comme ils arrivent en retard, et que toute la famille attend son pain en sirotant la soupe. L'enfant-pain entre dans un nid de regards venins. Il est d'abord mangé puis complètement dévoré en racontant comment, oui ! à l'étang parmi les herbes hautes les cimes et les neiges gris-bleu et… Là ! Sur la pierre grosse… Il a oublié le pain ; dernier festin pour les grands oiseaux.

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